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Une chambre en ville
90 min
Disponible jusqu'au 31/03/2025
À Nantes, en 1955, une bourgeoise et un ouvrier (Dominique Sanda et Richard Berry, splendides) s'aiment à en mourir sur fond de grande grève. Jacques Demy signe avec cette "tragi-comédie musicale" intégralement chantée l'un de ses chefs-d'oeuvre.
À Nantes, en 1955, les CRS dispersent violemment les ouvriers des chantiers navals, en grève depuis des semaines, qui manifestent pacifiquement avec leurs familles. Par la fenêtre, Mme Langlois, une veuve prompte à noyer sa mélancolie dans le muscadet, regarde son locataire, un métallo nommé François Guilbaud, battre en retraite dans un nuage de lacrymo. Le jeune ouvrier occupe sans le savoir la chambre d'Édith, sa fille, qui ne met plus les pieds chez sa mère depuis son mariage. Le jour même, pourtant, celle-ci débarque pour révéler que son époux avare, jaloux et impuissant lui fait vivre un enfer, et qu'une cartomancienne lui prédit une grande passion avec un métallurgiste. Pourrait-il s'agir de ce François mentionné par sa mère ? Le jeune homme, lui, a rendez-vous avec Violette, la timide vendeuse qui l'aime à sens unique…
Au diapason
Extraordinaire en baronne déchue et alcoolique qui "emmerde les bourgeois", Danielle Darrieux expose en vers et en musique les sentiments contradictoires que lui inspire son locataire, tandis que Dominique Sanda cherche son destin en talons hauts, nue sous son vison… Même si les premiers mots de ce film "en chanté" ne sont guère enchanteurs ("Police, milice, flicaille, racaille"), la touche Demy y éclate d’emblée. Le polo rose de François (Richard Berry), la robe pastel de sa Violette se détachent sur le gris-bleu des rues de Nantes, où une authentique grève de quatre mois a immobilisé les chantiers navals en 1955. Mais dix-neuf ans après la douceur déchirante des Parapluies de Cherbourg, le cinéaste insuffle à ce qu'il qualifia de "tragi-comédie musicale" des teintes nouvelles, plus âpres, étranges et vénéneuses. Entre mélo flamboyant, conte social et humour à contre-pied, il multiplie les audaces et les ruptures de ton. Malgré la belle partition de Michel Colombier, la force des dialogues en rimes, intégralement chantés, la splendeur du couple vedette et une critique enthousiaste, le public a boudé le film – comme le jury des César, qui ne lui a rien accordé en dépit de neuf nominations. S'il fut à contretemps de son époque, Une chambre en ville vibre au diapason de la nôtre.
Avec
Dominique Sanda
Danielle Darrieux
Richard Berry
Michel Piccoli
Jean-François Stevenin
Réalisation
Jacques Demy
Pays
France
Année
1982