Afrique du Sud - Le poison de la corruption

En 2016, la médiatrice de la République d’Afrique du Sud Thuli Madonsela publiait un rapport qui révélait un vaste système de corruption au plus haut niveau de l’État. Elle baptisait alors le phénomène "State Capture" : la capture de l’État. Après avoir tenté à tout prix d’en empêcher la publication, le président de l’époque, Jacob Zuma, est contraint de démissionner en 2018. Membre du Congrès national africain (ANC), le parti de Nelson Mandela, le dirigeant déchu refuse de témoigner devant la commission d’enquête qui l’incrimine, tandis que les malversations se poursuivent sans que leurs auteurs soient inquiétés. Quant au président actuel, Cyril Ramaphosa, qui porte lui aussi les couleurs de l’ANC, il peine à apporter le renouveau promis après le scandale. Véritable symbole du phénomène de capture de l’État, Eskom, la compagnie publique d’électricité, se retrouve aujourd’hui incapable d’en produire suffisamment, privant de courant les 60 millions de Sud-Africains jusqu’à douze heures par jour. Le 9 février dernier, Cyril Ramaphosa déclarait l’état de catastrophe nationale.

Un système qui perdure
Alors que la prochaine élection présidentielle doit se tenir le 29 mai 2024, le réalisateur Dominik von Eisenhart-Rothe dresse un état des lieux de la situation en Afrique du Sud, huit ans après les révélations de la "State Capture". Il rencontre notamment André de Ruyter, PDG d’Eskom de 2020 à 2023, qui raconte la tentative d’empoisonnement qu’il a subie pour avoir enquêté sur les réseaux de corruption sévissant au sein de l’entreprise, puis sa fuite à l’étranger pour se protéger. Ce documentaire édifiant donne également la parole à Thuli Madonsela, elle aussi contrainte de se mettre à l’abri pour avoir révélé le scandale, et à des journalistes d’investigation, qui mettent leur vie en danger en tentant de dévoiler les rouages d’un système qui perdure.