Une valse dans les allées

En Allemagne de l'Est, Christian, jeune homme taiseux et solitaire, est embauché au rayon boissons d'un supermarché. Nuit après nuit, sous la houlette de Bruno, il se familiarise avec le maniement des chariots élévateurs, les conflits entre secteurs ("On est en froid avec les conserves"), les rituels des employés, des pauses cigarettes dans les toilettes aux discrets chapardages dans les montagnes d'invendus. Christian, lui, est subjugué par la blonde Marion, qui officie au rayon confiseries...

Valse à trois temps
Dans le décor éminemment cinématographique des allées du supermarché, Thomas Stuber capte, au fil d'envoûtants travellings rythmés par "Le beau Danube bleu" ou la pop de Son Lux, le ballet millimétré des palettes, cartons et autres gerbeurs. Découpé en trois chapitres, son film, qui laisse affleurer une poétique mélancolie derrière des notes d'humour décalé, brosse le portrait transpirant d'humanité des petites mains du magasin, communauté solidaire d'âmes esquintées : Marion est prisonnière d'un pavillon de banlieue et d'un mari violent ; Christian fuit un passé tourmenté inscrit sur sa peau tatouée ; Bruno, perdant de la réunification comme tous les aînés du supermarché, dissimule sa détresse irrémissible derrière une attachante bonhomie. Emmenée par de formidables acteurs, à commencer par le duo d'amoureux empêchés formé par Franz Rogowski (Transit) et Sandra Hüller (Toni Erdmann), une romance pleine de délicatesse récompensée à la Berlinale.