Les délices d’Émilie-Romagne

Dans le nord-est de l‘Émilie-Romagne, l’eau est un élément structurant du paysage. Le Pô, dont l’un des bras traverse la ville de Ferrare, est le fleuve emblématique de la région. Il se jette 50 kilomètres plus loin dans la mer Adriatique via un immense delta. Au sud s’étend la lagune de Comacchio.
Durant la Renaissance, la dynastie des Este transforma Ferrare en un bastion culturel et politique. Milena Merli, restauratrice d’œuvres d’art, connait bien les fameux banquets qui rythmaient la vie de la haute société locale à l’époque. Les natures mortes sur lesquelles elle travaille renvoient à l’opulence. On y retrouve d’ailleurs les citrouilles, aujourd’hui utilisées comme farce des cappellacci di zucca, petits raviolis en forme de chapeau.
Au sud du delta, la lagune de Comacchio—appelée Valli di Comacchio—reçoit les eaux douces du fleuve et les eaux salées de la mer. Pier Carlo Farinelli y exerçait autrefois en tant qu’éclusier et garde-pêche , en italien capo valle. Les anguilles et les sardines étaient alors deux espèces très recherchées. Panées à la polenta, elles restent un mets de choix de la région.
Fidèle à sa réputation, la cuisine régionale célèbre d’ailleurs les saveurs généreuses. Anne Leone, pharmacienne et diététicienne à Codigoro, privilégie un régime plus léger. Sa version revisitée de la torta tenerina, célèbre gâteau au chocolat de Ferrara, est une promesse de gourmandise sans crainte pour la ligne.
Carlotta Santolini, biologiste marine, connaît la baie de Goro comme sa poche. Pendant longtemps, l’élevage de palourdes y a nourri l’économie locale — jusqu’à ce que les crabes bleus, venus clandestinement de l’Atlantique Ouest à bord de porte-conteneurs, envahissent les eaux adriatiques. Face à ce fléau, Carlotta n’envisage qu’une riposte : les transformer en savoureux beignets.