Mary Quant : mini jupe, maxi révolution

Mary Quant a-t-elle vraiment inventé la minijupe ? Pour le savoir, et surtout s'immerger dans le glamour, la créativité et l'esprit de la styliste iconique, disparue le 13 avril 2023 à l'âge de 93 ans, il faut regarder ce portrait-hommage tissé d'extraordinaires archives et de témoignages, dont ceux de son fils Orlando Plunket Greene, d'anciens collaborateurs, de ses modèles, de Dave Davies, des Kinks, et de nombreux représentants contemporains du monde de la mode, de Vivienne Westwood à Kate Moss. Ce travail de collecte permet de mesurer une part de l'héritage que cette gamine galloise éprise de liberté, qui a habillé les swinging girls des sixties de ses géniales intuitions, a laissé à son art. Il révèle aussi, au-delà de ses célébrissimes débuts, auxquels elle refusait de se laisser cantonner, comment son énergie créatrice a traversé les décennies. Chaussures, maquillage, ameublement et même, un temps, poupées… Si, au XXIe siècle, c'est au Japon que les boutiques Mary Quant (une centaine aujourd'hui) restent les plus prisées, sa trajectoire, familière en son pays, reste en partie méconnue de ce côté-ci de la Manche.

Euphorisant
"Je détestais tout ce que la mode était alors." Quand, fille de mineurs, elle débarque à Londres pour étudier les beaux-arts, à l'aube des années 1950, Mary Quant n'a pas encore lancé son fameux slogan ("Soyez libre, soyez vous-même") à ses contemporaines, mais elle le vit déjà intensément. Avec le soutien logistique et mondain de l'homme de sa vie, le dandy aristocrate Alexander Plunket Greene, rencontré pendant ses études, et d'un juriste doué pour la finance, Archie McNair, elle ouvre en 1955 sur King's Road sa première boutique, Bazaar, où, dans les premiers temps, les ventes du jour aident à fabriquer le stock du lendemain. Le succès est immédiat, comme si Mary Quant, avec ses couleurs vives, ses collants, ses minijupes et ses shorts, avait donné forme à l'ardente soif d'émancipation de sa génération. Bientôt, quiconque veut être "in" regarde vers Londres, et ses modèles, dont Twiggy, deviennent les égéries de cette révolution portée par la musique. S'inspirant de l'esthétique pop et arty de la styliste, l'actrice Sadie Frost, dont c'est la première réalisation, plonge dans l'effervescence euphorisante de ses années de jeunesse pour en raconter aussi l'avant et l'après, délicieusement British de bout en bout.