Varsovie 83, une affaire d'État

Le 12 mai 1983, Grzegorz Przemyk, 18 ans, est interpellé par la milice citoyenne dans le centre de Varsovie. Le lycéen, fils de la poétesse et militante anticommuniste Barbara Sadowska, refuse de présenter ses papiers d’identité. Embarqué au commissariat avec son ami Jurek Popiel, il y est roué de coups par les policiers, qui visent le ventre pour "ne pas laisser de traces", puis ordonnent son transfert à l’hôpital psychiatrique. Face à la vague d’indignation provoquée par le décès du jeune homme, survenu deux jours plus tard, les autorités s’emparent de l’affaire. Autour de Jurek et Barbara, qui réclament que justice soit faite, une redoutable machination politique va alors se mettre en place pour disculper les policiers…

Rouages de l’oppression
Inspiré d’un livre du journaliste Cezary Lazarewicz, le film de Jan Pawel Matuszynski (The Last Family) fait revivre les heures sombres de la Pologne communiste, étouffant sous la loi martiale instaurée par le général Jaruzelski, sur fond de répression du mouvement Solidarnosc. Procureurs limogés, ambulancier à qui l’on extorque de faux aveux par le biais de menaces ignobles, pressions incessantes exercées sur les proches de Jurek, dont le propre père va céder aux manigances des services de sécurité… : dans le sillage du jeune homme acculé, brutalement projeté dans l’âge adulte, le réalisateur expose par le menu l’éventail des stratagèmes déployés pour étouffer ce crime d’État. Des appartements de l’intelligentsia aux bureaux des ministères, d’un salon de coiffure de province à une cellule de prison, le soin apporté à la reconstitution injecte un réalisme saisissant à cette peinture terrifiante, aux couleurs blafardes, de la vie sous le joug communiste. Servie par un casting magistral emmené par Tomasz Zietek, une ode à la résistance aux résonances universelles.