Le peintre Emil NoldeDes ombres aux tableaux

Peintre intense et tourmenté, Emil Nolde s’est imposé comme une figure de l’expressionisme allemand, cet "art dégénéré" honni par les nazis. Célébré par la République de Weimar, l’artiste, qui se démarque de l’impressionnisme au tournant du siècle avec ses camarades du groupe Die Brücke, souhaite renouveler l’art allemand en introduisant dans ses toiles plus d’intériorité et de spiritualité. Mais si celui qui deviendra une icône de la modernité − chère à Helmut Schmidt comme à Angela Merkel – se voit interdit de pratiquer son art sous le IIIe Reich, produisant alors dans la clandestinité ses somptueuses aquarelles abstraites qu'il nomme ses "tableaux non peints", il amplifiera après-guerre son rôle de victime et réécrira son passé. Car Emil Nolde, antisémite, adhère en réalité au parti nazi par conviction dès 1934, rêvant de devenir le peintre officiel de la révolution culturelle aryenne, très loin de la légende de l’artiste persécuté longtemps entretenue par la Fondation et le musée Ada et Emil Nolde.

Clair-obscur
À la faveur d’un changement de direction en 2013 et au fil de nouvelles recherches, l’institution lèvera le voile sur une tout autre histoire. Le documentaire de Maria AnnaTappeiner retrace ce parcours en clair-obscur et explore l’œuvre foisonnante – comme les ambivalences – de ce peintre génial qui fut tout à la fois soutien et victime du nazisme.