Chansons du deuxième étage

Un soir, en ville, des événements étranges s’enchaînent sans logique : un employé est brutalement remercié, un immigré est agressé en pleine rue, un magicien rate son tour… De cette galerie de personnages se détache Karl, au visage couvert de cendres : il vient de mettre le feu à son magasin de meubles pour toucher la prime d’assurance. Cette nuit-là, personne ne réussit à dormir. Le lendemain, les signes d’un chaos imminent apparaissent. La folie gagne les conseils d’administration et la ville est paralysée par de monstrueux embouteillages…

Implosion générale  
Composé d’une succession de tableaux surréalistes et inspiré de l’œuvre désespérée du poète péruvien César Vallejo, ce premier volet de la “Trilogie des vivants” (qui se poursuivra avec Nous, les vivants et Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l'existence) distille le sentiment tragique de l’absurde. Tout se grippe, tout déraille… Comme les voitures bloquées dans les bouchons, les personnages, joués par des acteurs amateurs, semblent perdus au milieu des images. Fardés de blanc et vêtus de gris, ils finissent par se confondre les uns avec les autres, transformés en une masse humaine qui n’est plus qu’une excroissance de la ville. Dans ce monde qui implose, les fous et les médecins sont interchangeables, les rêves se mêlent aux cauchemars, la comédie et la tragédie se fondent en une même pâte. Un peu comme si un tableau d’Edward Hopper avait été revisité par Otto Dix. Le film s’impose ainsi autant par son esthétique, nourrie de beaux plans larges et fixes, que par sa vision désenchantée de la société occidentale. Au fur et à mesure que le chaos s’étend, une évidence angoissante s’impose : désormais, plus rien n’a de sens.